Emploi des seniors : la loi définitivement adoptée !

par | Nov 13, 2025 | Juridique

La loi dite « emploi des seniors », définitivement adoptée par l’Assemblée Nationale, a été publiée au Journal officiel du 25/10/2025. Ce texte reprend le contenu de plusieurs accords nationaux interprofessionnels :

  • Ceux du 14/11/2024 relatifs à l’emploi des salariés expérimentés et au dialogue social[1]
  • Celui du 25/06/2025 relatif aux transitions et reconversions professionnelles
  • La convention d’assurance chômage du 15/11/2024 et l’avenant du 27/05/2025 sur le bonus-malus.

Focus sur l’essentiel des dispositions.

La fin de la limitation des mandats de représentants du personnel

Depuis les ordonnances MACRON/PENICAUD de 2017, le nombres de mandats successifs au CSE était limité à trois. Cette limitation disparait, un salarié peut donc enchainer plus de trois mandats comme élu au CSE[2].

Les seniors dans l’entreprise et la branche

1/ Obligation triennale de négocier dans la branche sur l’emploi et le travail des salariés expérimentés, en considération de leur âge.

Comme souvent un certain nombre de thèmes doivent faire l’objet de la négociation quand d’autres sont simplement facultatifs.

Les thèmes obligatoirement évoqués :

  • Le recrutement des salariés expérimentés ;
  • Leur maintien dans l’emploi ;
  • L’aménagement des fins de carrière, en particulier les modalités d’accompagnement à la retraite progressive ou au temps partiel ;
  • La transmission de leurs savoirs et de leurs compétences, en particulier les missions de mentorat, de tutorat et de mécénat de compétences.

Les sujets facultatifs (et pourtant importants !) :

  • Le développement des compétences et l’accès à la formation ;
  • Les effets des transformations technologiques et environnementales sur les métiers;
  • Les modalités de management du personnel ;
  • Les modalités d’écoute, d’accompagnement et d’encadrement des salariés expérimentés ;
  • La santé au travail et la prévention des risques professionnels ;
  • L’organisation du travail et les conditions de travail.

A noter :

  • Un décret ultérieur précisera les informations nécessaires à cette négociation.
  • L’accord de branche peut prévoir un plan d’action type applicable de manière unilatérale par l’employeur dans les entreprises de moins de 300 salariés, en cas d’échec de la négociation et après information du CSE s’il existe et des salariés.

2/ Obligation triennale de négocier dans les entreprises de plus de 300 salariés sur l’emploi, le travail et l’amélioration des conditions de travail des salariés expérimentés, en considération de leur âge.

La négociation est précédée d’un diagnostic et doit évoquer les mêmes thèmes que ceux prévus dans le cadre de la négociation de branche Les mêmes thèmes facultatifs sont également possibles, pour ces derniers il est précisé que l’employeur peut envisager l’utilisation du fonds d’investissement dans la prévention de l’usure professionnelle (FIPU).

A noter : un décret ultérieur précisera les informations nécessaires à cette négociation.

3/ un nouveau contrat de travail : le contrat de « valorisation de l’expérience »

Ce contrat est mis en place à titre expérimental pour une durée de 5 ans. Il s’agit d’un CDI qui peut être conclu par toute entreprise (pas de condition d’effectif) avec un demandeur d’emploi :

  • Agé de 60 ans au moins (ou 57 ans si un accord de branche étendu le prévoit) ;
  • Qui n’a pas encore droit à une retraite de base à taux plein ;
  • Qui n’a pas été employé dans l’entreprise ou le groupe dans les 6 mois précédents.

En plus des modes de rupture classique du DI (démission, licenciement, rupture conventionnelle), ce nouveau contrat peut être rompu par l’employeur, unilatéralement, par une mise à la retraite dès lors que le salarié :

  • Atteint l’âge légal de départ à la retraite et remplit les conditions de liquidation à taux plein (c’est-à-dire au taux maximum)
  • ou Atteint l’âge du taux plein automatique (67 ans).

La période de préavis devra être respectée et une indemnité de mise à la retraite (au moins égale à l’indemnité de licenciement sera versée).

A noter : jusqu’au 31/12/2028, l’employeur est exonéré de la contribution patronale spécifique de 30% normalement due sur l’indemnité de mise à la retraite.

4/ Les entretiens de mi-carrière et de fin de carrière[3]

Un entretien de parcours professionnel de mi-carrière doit être organisé dans les 2 mois suivant la visite médicale de mi-carrière. Les mesures préconisées par le médecin du travail y sont évoquées ainsi que l’adaptation et aménagement du poste et des missions, la prévention des situations d’usure professionnelle, les besoins en formations et les souhaits de mobilité et reconversion professionnelle.

Un entretien de parcours professionnel de fin de carrière est organisé entre 58 et 60 ans. Il aborde, outre les sujets habituels de l’entretien de parcours professionnel, les conditions de maintien dans l’emploi et les possibilités d’aménagement de fin de carrière, comme le passage à temps partiel notamment dans le cadre de la retraite progressive.

5/ l’indemnité de départ à la retraite pour s’auto-financer un temps partiel[4]

Pour maintenir totalement ou partiellement la rémunération d’un salarié qui demande un temps partiel en fin de carrière, un accord d’entreprise (ou à défaut un accord de branche) peut prévoir l’utilisation de l’indemnité de départ qui serait due au moment de la liquidation de ses droits à retraite.

Evolution de l’entretien professionnel

L’entretien professionnel devient l’entretien de parcours professionnel.

Périodicité : dans la première année suivant l’embauche puis tous les quatre ans (c’était deux ans pour l’entretien professionnel jusqu’alors).

Il doit être proposé systématiquement à l’issue d’un congé de maternité, d’un congé parental d’éducation, d’un congé de proche aidant, d’un congé d’adoption, d’un congé sabbatique, d’une période de mobilité volontaire sécurisée, d’une période d’activité à temps partiel, d’un arrêt longue maladie, à l’issue d’un mandat syndical ou bien encore à l’initiative du salarié, à une date antérieure à la reprise de poste, si le salarié n’a bénéficié d’aucun entretien de parcours professionnel au cours des douze mois précédant sa reprise d’activité.

Objet : même s’il est réalisé par un supérieur hiérarchique, ce n’est pas un entretien d’évaluation. Il est consacré aux compétences du salarié et aux qualifications mobilisées dans son emploi actuel ainsi qu’à leur évolution possible au regard des transformations de l’entreprise, à sa situation et à son parcours professionnels, ses besoins de formation, ses souhaits d’évolution professionnelle, à l’activation par le salarié de son compte personnel de formation, aux abondements de ce compte que l’employeur est susceptible de financer et au conseil en évolution professionnelle.

Sanction du défaut d’entretien de parcours professionnel : au bout de 8 ans sans entretien et au moins une formation réalisée, un abondement du CPF est prévu (auparavant c’était 6 ans).

Rôle du médecin du travail : les mesures préconisées par le médecin du travail lors d’examens médicaux (embauche, retour congé maternité, poste à risques ou mi-carrière) sont évoquées dans le cadre de l’entretien de parcours professionnel.

Contenu de la BDESE : doit désormais y figurer un bilan de la mise en œuvre des actions de formation entreprises à l’issue des entretiens de parcours professionnels ou des périodes de reconversion mentionnées.

Reconversions et transitions professionnelles

1/ Un nouveau dispositif : la période de reconversion

La période de reconversion[5] remplace, à partir du 01/01/2026, les dispositifs de reconversion ou de promotion pour l’alternance ( ProA) et de transitions collectives (Transco).

La période de reconversion est ouverte au salarié qui souhaite bénéficier d’une mobilité professionnelle interne ou externe à l’entreprise. Elle permet d’obtenir une certification enregistrée au RNCP (répertoire national des certifications professionnelles), un CQP (certificat de qualification professionnelle), ainsi qu’un ou plusieurs blocs de compétences, ou un socle de connaissances et de compétences.

Période de reconversion interne : il faut un accord écrit entre l’employeur et le salarié. Le contrat de travail est maintenu et le salarié perçoit sa rémunération.

Période de reconversion externe : il faut un accord écrit entre l’employeur et le salarié pour organiser la suspension du contrat de travail. La période de reconversion dans une autre entreprise implique la conclusion d’un CDI ou CDD de 6 mois minimum, avec une période d’essai. Si celle-ci n’est pas concluante, le salarié retrouve son entreprise d’origine (poste initial ou équivalent) ou s’il refuse, il y a rupture de son contrat de travail initial (rupture conventionnelle). Si la période de reconversion est concluante avec la nouvelle entreprise, le contrat de travail avec l’entreprise d’origine est rompu (rupture conventionnelle).

Durée des actions de formation : entre 150 heures et 450 heures, réparties sur une période ne pouvant excéder douze mois, à l’exception de celles permettant l’acquisition du socle de connaissances et de compétences.

Financement : les frais pédagogiques des actions de formation sont financés par l’OPCO. Les actions de formation peuvent faire l’objet d’un cofinancement par la mobilisation du CPF du salarié, sous réserve de son accord (50% maximum des droits CPF en cas de période de reconversion interne mais pas de limite s’il s’agit d’une période de reconversion externe).

2/ Nouveau sujet de négociation collective

Pour toutes les entreprises et pour les branches, possibilité de négocier les modalités de mise en œuvre de la période de reconversion, notamment sa durée (avec une limite de 2.100 heures de formation sur une période de 36 mois), les certifications qui permettent d’en bénéficier et les salariés prioritaires.

Dans les entreprises d’au moins 300 salariés, la négociation triennale sur la gestion des emplois et des parcours professionnels (GEPP) peut désormais aussi porter sur les modalités d’organisation des périodes de reconversion externe (voir ci-dessous pour le contenu de ces périodes).

Pour les entreprises de 50 à moins de 300 salariés avec au moins un délégué syndical, la négociation doit être engagée lorsqu’au moins 10 % de l’effectif de l’entreprise pourrait bénéficier d’une période de reconversion externe sur une période de douze mois à compter de la date de début de la négociation (à défaut de DS ou en cas d’échec de la négociation, décision unilatérale avec consultation du CSE s’il existe).

Pour les entreprises de moins de 50 salariés, mise en œuvre unilatérale de la période de reconversion externe avec consultation du CSE s’il existe.

Tous ces accords et décision unilatérale doivent notamment aborder :

  • la prise en charge de l’écart éventuel de rémunération du salarié dont le contrat de travail est suspendu pendant la période de reconversion professionnelle externe,
  • l’augmentation éventuelle de la durée de la période de reconversion professionnelle et des actions de formation,
  • le montant des indemnités versées au titre de la rupture du contrat de travail du salarié bénéficiant d’une période de reconversion professionnelle,
  • l’utilisation éventuelle du CPF pour financer les frais pédagogiques.

[1] L’ANI relatif au dialogue social a été signé par la CGT
[2] Art. L2314-33 C. Trav.
[3] Art. L6315-1 C. Trav.
[4] Art. L1237-9 C. Trav.
[5] Art. L6324-1 à L6324-11 C. Trav.

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