PAIEMENT DES HEURES SUPPLÉMENTAIRES : Travailler plus pour vraiment gagner plus ?

par | Sep 2, 2025 | Juridique

En 2018, le gouvernement a fait le choix de « simplifier » le bulletin de salaire. Sous ce prétexte, il a fait disparaître le détail des cotisations dites patronales, dissimulant ainsi aux salariés une partie du calcul de leur salaire.

Parmi les informations qui demeurent immédiatement disponibles sur la fiche de paie aujourd’hui, beaucoup sont difficiles à comprendre lorsqu’on n’est pas un spécialiste. Le patronat utilise très opportunément cette complexité, à son profit, en ne payant pas aux salariés ce qui leur est dû.

Ainsi dans plusieurs domaines de la paie, l’application de la réglementation sociale est bien souvent incomplète voire incorrecte, ce qui aboutit à verser un salaire qui n’est pas le bon.

Nous faisons ici le point sur l’une des principales erreurs : le paiement des heures supplémentaires.

L’heure supplémentaire est définie comme toute heure accomplie à la demande de l’employeur, au-delà de la durée légale (35 heures par semaine) ou de la durée équivalente prévue dans l’entreprise (32 heures par exemple). Le décompte est hebdomadaire, sur la semaine civile (du lundi au dimanche).

Le Code du travail prévoit un contingent de 220 heures par an. Mais un accord d’entreprise ou de branche peut fixer un contingent supérieur ou inférieur. Ce n’est qu’en l’absence d’un tel accord que le contingent légal s’appliquera, peu importe qu’il soit plus ou moins favorable que l’accord.

Attention : le salarié qui effectue des heures supplémentaires ne doit pas dépasser la durée maximale hebdomadaire (soit 48 heures sur une même semaine ou 44 heures par semaine en moyenne sur douze semaines consécutives). Là aussi un accord d’entreprise ou de branche peut augmenter cette durée moyenne à 46 heures sur douze semaines.

L’employeur peut dépasser le contingent d’heures supplémentaires prévu dans l’entreprise, sous certaines conditions :

  • l’obtention de l’accord du CSE lorsque celui-ci existe ;
  • l’octroi d’une contrepartie obligatoire en repos égale à :
  • 50 % des heures supplémentaires accomplies au-delà du contingent annuel ;
  • 100 % des heures supplémentaires accomplies au-delà du contingent annuel, pour une entreprise de plus de 20 salariés.

Etre vigilant sur le taux servant au calcul des majorations

Le Code du travail prévoit une majoration de la rémunération des heures supplémentaires égale à :

  • 25 % pour les 8 premières heures travaillées dans la semaine (soit de la 36e à la 43e heure);
  • 50 % pour les heures suivantes (soit à partir de la 44e heure)

Attention : comme pour le contingent, un accord d’entreprise ou de branche peut prévoir une ou plusieurs autres majorations, supérieures ou inférieures. Celles-ci devront être néanmoins de 10 % minimum.

Beaucoup d’employeurs se contentent de majorer le taux horaire du salaire de base. Or les majorations des heures supplémentaires doivent être calculées sur la base du salaire horaire effectif payé. Il faut donc prendre en compte certaines primes et les intégrer au taux horaire.

Cela signifie donc que le taux horaire servant au paiement des heures supplémentaires est supérieur au taux horaire de base.

Doivent ainsi être prises en compte les primes et indemnités qui sont la contrepartie directe du travail fourni par le salarié et inhérentes à la nature de ce travail (circulaire DRT 94-4, 21 avril 1994).

Quelques exemples de primes intégrables :

  • Primes résultant des conditions de travail : danger, insalubrité, froid, polyvalence, risque, salissure…
  • Majorations particulières : travail du dimanche, jour férié, nuit… (Cass. soc., 22 mai 2019, n° 17-22.376)
  • Primes en fonction du lieu de travail : détachement à l’étranger…
  • Primes liées aux résultats : prime de production (dépendant d’un groupe de salariés Cass. soc., 29 oct. 2007, n° 06-42.426), rendement (lié au rendement individuel ou collectif) …
  • Primes liées à la présence du salarié : assiduité…

Sont donc exclues les primes qui rémunèrent autre chose que le travail lui-même (l’ancienneté par exemple) ou un rendement collectif lorsque l’intervention du salarié sur ce rendement n’est pas directe, ou bien encore la prime d’intéressement.

Il n’existe donc aucune liste exhaustive permettant d’apprécier a priori l’intégration ou non d’une prime dans le calcul de la majoration des heures supplémentaires. Il faut donc procéder à une analyse approfondie de chacune des primes existantes et caractériser en quoi les primes sont rattachées ou non, à l’activité personnelle du salarié (Cass. soc., 5 mars 2025, n° 22-21.359).

Exemples de calculs

Les éléments pris en compte dans le calcul des heures supplémentaires sont surlignés en bleu dans les tableaux ci-dessous. On remarque bien la différence entre méthode patronale et méthode légale : la prise en compte ou non des primes.

Elle produit une différence de 28,57 € par mois, soit 1028,35 € sur trois ans et 13 711,35 sur quarante ans – manque à gagner non négligeable pour le salarié !

Méthode patronale Heures travaillées
dans le mois
Taux horaire Montant
Salaire de base 151,67 13 € 1 971,71 €
Heures supplémentaires majorées à 25%
(ce qui revient à multiplier par 1,25 l’assiette prise en compte)
17,33 16,25 €
= (salaire de base x 1,25)
281,61 €

= (17,33 x 16,25)

 

Prime de rendement 150 €
Prime de bruit 50 €
TOTAL BRUT 2 453,32 €

 

Méthode légale Heures travaillées
dans le mois
Taux horaire Montant
Salaire de base 151,67 13 € 1 971,71 €
Heures supplémentaires majorées à 25%
(ce qui revient à multiplier par 1,25 l’assiette prise en compte)
17,33 17,90
(salaire de base + primes) x1,25151,67 
310,18 €

 

 

Prime de rendement 150 €
Prime de bruit 50 €
TOTAL BRUT 2 481,89 €

 

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