NAO 2025 : Le pouvoir d’achat des travailleurs encore mis à mal !

par | Mar 4, 2025 | Juridique

Les premiers chiffres des Négociations Annuelles Obligatoires (NAO) révèlent des négociations 2025 plus tendues sur les salaires et donc des mesures salariales en nette baisse par rapport aux années précédentes et une réduction du nombre de signatures d’accords.

Des augmentations de salaires en baisse par rapport à 2024

Moins d’accords salariaux ont été signés puisqu’à mi-novembre 2024, ce sont 242 accords d’évolution des salaires qui ont été signés, contre 262 l’année dernière. Cela montre une tendance pour les nombreuses négociations en cours et à venir.

Par ailleurs, le montant moyen des augmentations totales (augmentations générales et augmentations individuelles) est pour l’instant en net recul par rapport à l’année dernière, avec 2,33 % d’augmentation en moyenne en 2025 contre 3,48 % en 2024 toutes catégories socio- professionnelles confondues. Les augmentations sont de 2,23 % pour les cadres, 2,36 % pour les professions intermédiaires et 2,41 % pour les ouvriers et les employés, contre respectivement 3,37 %, 3,55 % et 3,58 % en 2024.

Ces mesures ne concernent que les entreprises qui ont signé des accords salariaux. Près de 43 % des entreprises n’ont pas négocié de budget d’augmentation des salaires, privilégiant les primes et les éléments périphériques de la rémunération comme le « forfait mobilité durable ». Si on tient compte de ces entreprises, le montant moyen des augmentations totales est désormais de 1,33 % en 2025. Celles-ci sont en moyenne de 1,23 % pour les cadres, 1,34 % pour les professions intermédiaires et 1,38 % pour les ouvriers et employés.

Les entreprises ont également moins recours à la prime de partage de la valeur (PPV) que lors des NAO précédentes (30 % en 2024, 19 % en 2025), et le montant moyen de la PPV qui est accordé est aussi plus faible (862 euros en 2024, 714 euros en 2025). Au bout du compte, ce sont donc tous les éléments de la rémunération des travailleurs qui sont sérieusement orientés à la baisse.

Un des arguments mobilisés par le patronat pour freiner les augmentations de salaires est celui du ralentissement de l’inflation en 2025. Il est alors nécessaire de rappeler ici deux éléments :

1. Il est préférable d’utiliser l’indice des prix à la consommation harmonisé (IPCH) produit par l’Insee pour Eurostat plutôt que l’indice des prix à la consommation (IPC) produit par l’Insee et privilégié par le gouvernement et le patronat. L’IPCH est plus proche de la réalité des dépenses des ménages puisqu’il ne prend en compte que les seules dépenses qui restent à leur charge. La Banque de France prévoit une hausse de 1,5 % de l’inflation IPCH en 2025. De ce fait, les augmentations de salaires prévues en 2025 seraient insuffisantes pour compenser la hausse du niveau général des prix, entrainant une nouvelle perte de 0,2 point de pourcentage de pouvoir d’achat.

2. Il faut tenir compte des pertes de pouvoir d’achat des salariés qui se sont accumulées depuis le début de la crise inflationniste à l’été 2021. En effet, même si l’inflation ralentit, les prix ne diminuent pas : ils ne reviennent pas à ce qu’ils étaient avant la crise inflationniste. En comparant le niveau des salaires et des prix d’aujourd’hui à ce qu’ils étaient il y a quatre ans, on peut faire apparaitre les gains ou les pertes cumulées de pouvoir d’achat. Sur les quatre dernières années, les travailleurs ont perdu plus de 4 points de pouvoir d’achat !

Concrètement, pour un travailleur rémunéré au salaire médian, cette perte de 4 points depuis 2020 se traduit par une perte, en 2024, de près de 130 euros de pouvoir d’achat par mois, soit 1 560 euros par an !

Une autre façon de se représenter l’ampleur de ces pertes est de se demander à quelle année dans le temps elles nous ramènent en termes de pouvoir d’achat. À partir des données de la Dares, nous montrons qu’en septembre 2024, le pouvoir d’achat du salaire mensuel de base est revenu à son niveau de juin 2013 !

Les salaires devaient augmenter d’au moins 4,5 % par an en moyenne en 2024 et en 2025 pour rattraper les pertes de pouvoir d’achat subies depuis le début de la crise inflationniste. On est alors très loin des politiques salariales qui viennent d’être négociées, qui sont en moyenne de 1,3%…

À RETENIR

  • Les NAO 2025 devraient aboutir sur des augmentations de salaires en nette baisse, avec une hausse attendue de 1,33 % en moyenne en 2025 toutes catégories socio-professionnelles confondues contre 3,48 % en 2024.
  • Si on tient compte de l’inflation IPCH annoncée pour 2025 et des pertes de pouvoir d’achat qu’ont déjà subi les travailleurs depuis l’été 2021 avec la crise inflationniste, les budgets d’augmentations pour 2025 sont très largement insuffisants.
  • Il est primordial d’utiliser l’IPCH plutôt que l’IPC lors des NAO.
  • Les salaires devraient augmenter d’au moins 4,5 % par an en moyenne en 2024 et en 2025. Si tel n’est pas le cas, les pertes de pouvoir d’achat risquent alors d’être aggravées et durables.
  • En septembre 2024, le pouvoir d’achat du salaire mensuel de base était déjà revenu à son niveau de juin 2013.

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